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CESEC

Conseil économique, social, environnemental et culturel de la Corse



Cunsigliu ecunomicu suciale
di l'ambiante è culturale di Corsica

Conseil économique social
environnemental et culturel de Corse


Avisu rilativu à L’attualizazione di a pulitica d'ingeneria finanziara (Avisu CESEC 2025-25)

Avis relatif à L’actualisation de la politique d'ingénierie financière (Avis CESEC 2025-25)


Seduta pienaria di u 22 d’aprile di u 2025



Rapport présenté


Avis du CESECC

Dans le droit fil du rapport « Ecunumia 2030 », support de la révision du SRDEII pour la Corse, l’ambition de la Collectivité de Corse est de participer à la construction de l’économie de la Corse de demain. Une des principales actions de cette politique se retrouve dans l’axe stratégique « permettre le financement des entreprises Corses » du SRDEII.
 
La mission de la Collectivité de Corse consiste à répondre au besoin de financement des entreprises et à soutenir leur activité, en se conformant aux orientations politiques définies par Conseil exécutif de Corse, notamment un renforcement de la production locale de biens et de services, mais également une évolution de leur modèle d’exploitation afin qu’il soit plus conforme aux enjeux de justice sociale et de transitions économique, numérique et écologique.
 
L’effort à réaliser est significatif, car l’économie de notre île, insuffisamment diversifiée et trop basée sur la consommation, est exposée aux effets les plus néfastes de la globalisation, ainsi qu’à des logiques de concentration économique, de dépendance et de déséquilibre structurel.
 
Ces différentes lignes directrices - financement de l’économie, renforcement de la production locale, accompagnement des transitions - se sont matérialisées par la mobilisation de plusieurs programmes de soutien économique.
 
Selon les statistiques comparatives de l’association des régions de France qui s’appuie sur l’étude des comptes administratifs des régions, la Corse est la collectivité qui consacre, par habitant, le plus de budget public au développement économique. Ce montant s’établit pour la Corse à 204 € par habitant.
 
Des instruments d’ingénierie financière sont déployés au-delà des seuls secteurs de l’artisanat, de l’industrie, des services et du commerce suivis par l’ADEC.
 
La Collectivité de Corse, en lien avec ses autres Agences et Offices, met en œuvre des outils dédiés au secteur agricole pour l’installation des jeunes agriculteurs (ODARC) ou touristique (ATC), ainsi qu’une offre dédiée aux communes au travers du fonds Paese, consacré principalement à soutenir les initiatives économiques en milieu rural et de montagne.
 
Les instruments financiers occupent ainsi une place centrale parmi tous les dispositifs de soutien du développement économique.
Mis en œuvre pour pallier les défaillances de marchés, en même temps que les carences de l’initiative privée qui génèrent toutes deux des situations d’investissement non optimales, les instruments financiers constituent un moyen durable et efficace d'investir dans le renforcement, dans la croissance et dans le développement de l’économie de la Corse.
 
Ils peuvent soutenir de nombreux objectifs de développement, au profit d’un large éventail de bénéficiaires finaux et présentent comme avantage principal un fort effet levier de l’euro public (capacité à entraîner des investissements bancaires et privés en complément d’une aide publique).
 
Les instruments financiers de la Collectivité de Corse, en complément des aides directes (subventions), mettent à disposition des entreprises insulaires des prêts bonifiés, des garanties bancaires ainsi que des investissements en haut de bilan qui leur permettent de financer leur développement.
 
Cette politique économique, qui permet d’être au plus près des entreprises, facilite l’accès au crédit bancaire. Par ailleurs, elle a la vertu de rationaliser la dépense publique car les sommes prêtées ou investies ont vocation à être restituées à la Collectivité de Corse, qui peut ensuite les réutiliser.
 
Le dimensionnement global de cette politique pour 2025-2030 et son financement
 
Le 31 décembre 2023, une partie des instruments financiers les plus anciens de la Collectivité de Corse cofinancés par les fonds européens et le programme exceptionnel d’investissement (PEI) ont cessé de fonctionner et sont entrés en phase de retour. Il est donc important de renouveler l’offre d’ingénierie financière à destination des entreprises.
 
Ce renouvellement s’appuie sur l’identification de besoins du tissu, économique et sur la proposition de nouveaux instruments financiers, détaillés au chapitre 3, pour un besoin total de financement de 54 M€.
 
Afin de répondre au mieux à ce besoin de soutien du tissu économique en matière d’ingénierie financière, les principes directeurs suivants sont proposés pour financer la mise en œuvre des nouveaux instruments :
  •  Utiliser les fonds européens du nouveau programme FEDER FSE+ 2021-2027 pour un montant de 18 M€ ;
  • Avec des contreparties pour un montant de 12 M€ qui ne seraient pas portées par la CDC mais par les organismes gestionnaires publics ou privés pour la constitution de nouveaux fonds ;
  • Ne pas accroitre le volume de dépenses d’investissement de la CDC, mais recycler, comme le prévoit l’UE, et uniquement après constatation effective du retour des fonds à la CDC, les fonds européens, nationaux et régionaux en phase de retour vers des nouveaux fonds à créer, pour le restant à financer.
 Le total des ressources évalué à la date de rédaction de ce rapport permet ainsi de couvrir le besoin de 54 M€.
 
La logique vertueuse ainsi retenue dans la constitution des fonds repose donc sur un trépied de financement alliant la mobilisation du programme FEDER-FSE+ 2021-2027, des contreparties portées par les opérateurs publics ou privés et les crédits issus du retour des fonds d’ingénierie financière dont la date d’engagement est échue.
 
Les interventions prévues sous forme d’instruments financiers s’articulent autour des cinq orientations suivantes :
 
- Soutenir la trésorerie des entreprises : Dans le contexte économique actuel, le soutien de la trésorerie des entreprises corses est un enjeu majeur. Il est donc proposé la création d’un instrument financier de soutien à la trésorerie des entreprises corses, doté d’un montant maximum de 10 M€.
 
- Accompagner les « premiers pas » de la catégorie de publics qui présentent des garanties financières généralement jugées insuffisantes par les banques traditionnelles ; l’objectif est de soutenir la création d'entreprises et le passage à l'activité commerciale des entreprises nouvellement créées, en participant à la couverture des besoins de financement de la phase de création, mais également d’accompagner les étapes ultérieures du projet entrepreneurial. Il est donc proposé la création d’un nouvel instrument financier de prêt d’honneur « premiers pas » pour un montant maximal de 2 M€ ainsi qu’un instrument financier de prêt d’honneur à destination des entrepreneurs n’ayant pas accès aux emprunts bancaires pour un montant maximal de 2 M€.
 
- Financer la création, le développement et accompagner les transitions des entreprises ; Il s’agit d’accompagner en priorité les entreprises qui réduisent l’impact de leur action sur l’environnement et qui offrent une politique sociale avantageuse. La prédominance des TPE favorise des modes de financement sous forme de crédits ou de garanties, plus accessibles que des financements en fonds propres. Néanmoins, pour trouver une cohérence avec la politique économique de la CDC, la distribution de crédits et de garanties se resserrera, en priorité, autour des projets de production de biens et de services.
 
Il est donc proposé la création de deux nouveaux instruments financiers :
  •  Un instrument financier de prêts de transition doté de 17 M€ maximum ;
  • Un instrument financier de garantie bancaire d’un montant maximum de 13 M€ .
 
- Accompagner l’innovation via des financements de haut de bilan, en concrétisant des opérations en direction des startups innovantes pour accompagner la phase d’amorçage et de développement ; Le rôle de l’innovation a été central dans le développement économique et la progression des niveaux de vie, et il en sera de même pour le futur, en Corse comme ailleurs dans le monde. Les entreprises insulaires vont connaître à horizon d’une décennie des défis importants : intelligence artificielle, raréfaction des ressources naturelles, changements géopolitiques, nouvelles habitudes de consommation… qui vont modifier en profondeur leurs structures économiques et nécessiter d’augmenter leurs potentiels d’innovation pour y répondre.
 
Face à ces défis, largement documentés dans le SRDE2I de Corse adopté par l’Assemblée de Corse en 2022, il est nécessaire dans un premier temps de mieux organiser le soutien public à l’innovation, ce qui est en cours sur la base de la délibération 23/154 du 1er décembre 2023 portant sur l’adaptation de la stratégie de l’innovation en faveur des entreprises Corses. Les besoins se situent principalement sur l’amorçage (jeunes pousses), auquel un fonds créé par la CdC lors de la précédente programmation européenne, mais également sur le capital-risque et le capital-développement, sur lequel est concentré le fonds Travalcà lancé en 2023.
 
Il est donc proposé la création d’un instrument financier de haut de bilan dédié à l’amorçage et au développement de projets innovants doté de 6 M€ maximum.
 
- Répondre aux besoins spécifiques de financement du secteur de l’ESS en développant un ensemble d’instruments dédiés aux acteurs de ce secteur.
 
L’ESS en Corse constitue un secteur dynamique, fondé sur des valeurs de solidarité, d’inclusion sociale et de développement durable. Essentielle pour l’île, elle joue un rôle clé dans le renforcement de la cohésion sociale et le développement local, des enjeux majeurs pour la Corse.
 
Afin de poursuivre l’accompagnement de ce secteur d’utilité sociale et constitué d’entités qui travaillent à proposer des solutions concrètes à des problématiques porteuses de sens, en particulier pour notre île, il est proposé de constituer différents nouveaux instruments dédiés.
 
Il est proposé la création d’un instrument financier de trésorerie ESS pour un montant maximal de 3 M€ ainsi que d’un instrument financier de garantie ESS pour un montant maximal de 1 M€.
 
Une gouvernance clarifiée pour l’ingénierie financière de la Collectivité de Corse.
 
La mise en œuvre d’outils d’ingénierie financière, surtout lorsqu’ils sont financés par des programmes opérationnels européens, appelle une organisation clairement identifiée par les autorités européennes, françaises et territoriales, par les potentiels opérateurs et surtout par les bénéficiaires.
 
Dans ce cadre, il est proposé :
 
  • Que sur proposition du Conseil exécutif, l’Assemblée de Corse décide de l’opportunité de la création de nouveaux instruments financiers ;
  • Que le Conseil exécutif soit mobilisé pour décision concernant chaque engagement ou désengagement relatif aux investissements ou retours de fonds des instruments financiers créés par décision de l’Assemblée de Corse et qu’il rende compte annuellement à l’Assemblée de Corse de son action ;
  • Que l’ADEC par délégation de la Collectivité de Corse mette en œuvre les instruments financiers dédiés aux entreprises dans le respect des dispositions prévues dans le présent rapport et de la convention de délégation de tâches en vue de la mise en œuvre des instruments financiers du Programme FEDER FSE+ 2021-2027.
 
L’Assemblée de Corse va en effet être saisie, concomitamment à l’examen du présent rapport, d’un rapport visant à autoriser le Président du Conseil Exécutif de Corse à signer une convention de délégation de tâches à l’ADEC en vue de la mise en œuvre des instruments financiers du Programme européen FEDER FSE+ Corse 2021-2027.
 
Concernant le rapport présenté le CESECC émet les observations suivantes :

Sur le plan social,

Si le CESECC est conscient que ce rapport va être bénéfique aux entreprises corses, il souhaiterait néanmoins que soit mis en place un process, via un outil idoine de vérification, qui permettrait d’évaluer et de quantifier quels sont les retours vertueux et bénéfiques de tous ces investissements pour les salariés ; par exemple via la création d’emplois, l’amélioration de leurs conditions de travail (amélioration par les entreprises des conditions prévues aux conventions collectives), garanties sociales renforcées.

Parallèlement, le CESECC entend et se félicite :
  • De la volonté de la CDC de corréler performance économique des entreprises avec politiques sociales ambitieuses ;
  • Des contreparties qui seront insérées dans le cahier des charges livré aux opérateurs quand ils devront exposer leur projet avec un volet social qui sera inclus dans les critères d’éligibilité.
Concernant le secteur de l’ESS,

Le CESECC est convaincu qu’il convient de revoir le statut social des personnels qui y travaillent autant qu’il est urgent, relativement aux traitements des dossiers concernant les fonds européens et leurs versements, que les entreprises ne soient plus pénalisées par de trop importants retards de perceptions.
Le CESECC réitère donc, à nouveau, sa demande de renforcement de l’ingénierie nécessaire au montage de dossier mais aussi à la récupération des fonds européens.
 
 Dans le domaine des transports,

Le CESECC s’interroge sur le plan de restructuration envisagé au sein d’Air CORSICA et sur l’éventuelle création de sociétés de sous-traitances concernant la billettique et la plateforme téléphonique.

Sur ce point, le CESECC entend que ces structures pourraient, si elles venaient à solliciter des aides, y être éligibles en cas de respect des critères définis et des conditions sociales fixées.

Sur le plan environnemental,

Le CESECC souligne la bonne initiative incitative précisée au sein de l’orientation 3 visant à accompagner, en priorité, les entreprises qui réduisent l’impact de leur action sur l’environnement dans une démarche RSE et souhaite que le principe d’éco conditionnalité des aides de la CDC, concernant les marchés publics, soit appliqué pour les aides financières accordées aux entreprises privées afin de les aider à s’adapter aux effets du dérèglement climatique, aux exigences de la loi climat et résilience, et à les inciter à respecter les codes de l’environnement et de l’urbanisme.

Par ailleurs, le CESECC encourage à la mise en place d’une ingénierie commune Etat / CDC afin d’aider les PME à tenir compte des enjeux incontournables de transition écologique et économique.

Dans le domaine agricole :

Le CESECC entend la possibilité de financement du secteur de l’agri-tourisme de production autant que la transversalité des opérateurs (agences et offices) concernant les possibilités et la diversité des sources de financements. 

Sur l’ouverture à l’international :

Le CESECC prend note de la volonté de la CDC d’encourager la dynamique de soutien des entreprises exportant (400 actuellement) avec un objectif affiché de 1000 structures à horizon 2030.

Sur le plan bancaire :

Le CESECC encourage la CDC à se rapprocher de la BPI « Antenne Corse » concernant les différents mécanismes prévus afin d’aider les PME à s'inscrire dans une démarche de transition écologique : prêts action climat, prêt économie énergie, prêt vert etc.

Parallèlement, le CESECC prend note de la volonté de la CDC, en vue d’étoffer cette politique d’ingénierie financière, de créer une banque publique territoriale Corse d’investissement.

Cet opérateur intégré pourrait loger, au sein d’une structure unique, les activités relatives à l’ensemble des problématiques de financement : de l’accès aux fonds pour les entreprises à la gestion des participations publiques au capital d’entités intervenant dans les secteurs stratégiques, voire de mobilisation du niveau d’épargne conséquent des ménages corses.

Dans le domaine culturel :

Si le CESECC entend que M. le conseiller exécutif a évoqué le fonds de roulement pour la culture et que celui-ci serait intégré dans le secteur de l’ESS, il souhaite néanmoins, sur ce point, des informations complémentaires.

Parallèlement, le CESECC s’interroge concernant l’instrument financier de trésorerie prévu (3M€) :
  •  Sur le volume spécifiquement dédié au secteur culturel ;
  •  Sur la possibilité immédiate d’y recourir.
 
Le CESEC souhaite être destinataire d’un bilan précis et chiffré des effets, pour les entreprises, en matière sociale et environnementale en particulier, de la mise en œuvre des instruments financiers mobilisés par l’ADEC jusqu’en décembre 2023.
Le CESEC émet un avis positif concernant l’actualisation de la politique d’ingénierie financière.

Rédigé le 22/05/2025 et modifié le 22/05/2025 à 15:48