Discorsu di a Presidente di l’Assemblea di Corsica di a sessione di u 5 d'uttobre di u 2023


Discours de Marie-Antoinette Maupertuis*, Présidente de l'Assemblée de Corse, prononcé le 5 octobre au cours de la session ordinaire




Sgiò Presidente di u Cunsigliu esecutivu di Corsica,
Signore è signori i cunsiglieri esecutivi,
Signore è signori i cunsiglieri à l’Assemblea di Corsica,
Care tutte, cari tutti,
 
U mese di sittembre fù caldu, strazziatu mà dinò riccu d’emuzione :
Hè statu caldu è l’avete capita chì u cambiu climaticu ghjè cuì è bellu che cui. Un si ne pò più ! Avemu tutti da travaglià pè pudè fà cresce a nostra resistenza à l’altezza di e timperature.
 
Strazziatu, per via di trè drami : Prima u terramottu in Maroccu, incù l’epurazione etnica orrida in Armenia è po l’accidente di a strada à Venezia di sta settimana.
Vogliu avè una pensata per tutte e vittime di ste catastrofe.
Ayons une pensée pour les victimes du tremblement de terre au Maroc, nous avons une communauté marocaine importante en Corse qui a été profondément touchée. Une pensée pour nos amis arméniens dont nous partageons le combat et la résistance depuis des années et aussi une pensée pour ces italiens et ces touristes pris dans l’accident tragique de bus de Venise.
 
Eppo stu mese di sittembre hè statu dinò riccu. In scambii pulitichi incù a visita di u Presidente Macron. Riccu in emmuzione è in ricordu incù e cumemorazione di a Liberazione. Riccu dinò in gioia incù a Creazione di u Cardinale Bustillo
Vogliu salutà dinù certe bone nutizie è felicità u professore Agostini per u so premiu Nobel di Fisica è à Marie-Arlette Carlotti, a mio paisana balanina ch’hè diventata a prima donna questore di u Senatu. Tanti auguri à sti Corsi chì ci facenu onore.
 
Mercredi dernier, au cours d’une session solennelle, le président de la République, Emmanuel Macron, s'est exprimé devant notre assemblée.
L’enjeu ici n’est pas de commenter son propos, puisque nous aurons le temps de débattre de ce sujet, dès cet après-midi, dans le cadre d’une séquence dédiée au processus et à sa poursuite.
Permettez-moi cependant de me livrer à quelques réflexions, à votre attention et à celle des Corses qui nous écoutent.
Tout d’abord, la venue du Président Macron marque, à mon sens, un renouveau dans les relations entre notre île et l’Etat. En effet, c’est la première fois, depuis l'accès aux responsabilités des nationalistes, et les votes successifs en faveur de l’autonomie, il marque la volonté d’ouvrir une nouvelle phase du processus politique en cours depuis plus d’une année. La parole « forte » du Chef de l’Etat a été livrée donc ici dans notre hémicycle.
Cette parole est intervenue dans un cadre clair, celui des négociations avec le gouvernement et, nous pouvons convenir du fait que certaines de nos attentes ont pu trouver un écho satisfaisant dans l’intervention du Président de la République, écho qui a de nouveau retenti le 4 octobre devant le conseil constitutionnel à l’occasion des 65 ans de la Constitution française.
Un pas clair a été franchi vers une plus grande reconnaissance des spécificités de la Corse et de son identité.
En confirmant l’inscription de la Corse dans la Constitution, et la construction d’un modèle d’autonomie propre à notre île, la voie semble dégagée pour la prise en compte de notre singularité à la fois insulaire, culturelle, linguistique et méditerranéenne bien-sûr.
 
Vous le savez bien, ce moment, ce kaïros est venu clore une première phase du processus. La deuxième étape s’ouvre, nous en parlerons cet après-midi.
Elle reposera à mon sens sur 3 volets.
Un volet de négociation avec le gouvernement d’abord, pour définir le contenu et les modalités de l'autonomie « à la corse ».
Il est de notre devoir aujourd’hui d’obtenir un maximum d’avancées et d’entrainer un effet cliquet pour que ces dernières ne soient jamais remises en cause. Un effet cliquet également pour que les évolutions institutionnelles futures ne puissent aller que dans un sens : celui du renforcement de notre autonomie, de nos acquis juridiques, culturels, économiques et sociaux.
Et puis dans un second temps, un volet de négociations avec le Parlement, pour convaincre les députés bien-sûr le Sénat de la nécessité et de l'intérêt de permettre à la Corse d’être vraiment autonome. Sur ce point, je souhaite aujourd’hui assurer tous nos parlementaires de ma confiance la plus totale. Nous connaissons leur talent, leur qualité et leur compétence. Je sais leur capacité à réunir et à convaincre autour d’un projet commun à la fois humain mais aussi politique et nous serons, en élus responsables, à leurs côtés dans ce travail.
Enfin, troisième volet, la recherche d’un point d’équilibre nous concerne nous, élus de cette Assemblée et du Conseil exécutif. Nous ne sommes pas tous d’accord, et c’est normal, c’est la démocratie. Nous ne le serons pas plus après la révision constitutionnelle et c’est heureux, c’est la diversité des opinions démocratiques de la Corse. Mais un des enjeux consiste désormais à parler tous d’une seule et même voix. Être autonome ne signifie rien d’autre que gérer en responsabilité, un certain nombre de compétences, au plus près des citoyens. Je crois fermement que nous en sommes tous capables.
 
En tant que Présidente de l’Assemblée de Corse, je crois que le mot d’ordre à ce stade est l’union. L’union dans le travail. L’union de tous dans l’intérêt d’une avancée, qui sera pour certains trop faible, pour d’autres trop élevée, mais qui sera de manière certaine, la seule en capacité de faire en sorte que la Corse rejoigne enfin et de manière définitive le cercle des régions autonomes d’Europe, en particulier celui des îles de méditerranée.
 
D’union et d’alliance, il en a été plusieurs fois question, dans le cadre des commémorations pour le 80e anniversaire de la libération de la Corse, premier territoire métropolitain à se libérer. Depuis la fin du mois d’août nous rendons hommage aux résistants corses, qui ont combattu avec bravoure pour la liberté et la démocratie dont nous jouissons aujourd’hui. Ils ont combattu car il leur était impensable de vivre sous le joug d’une idéologie meurtrière et inhumaine. Dans ces instants terribles, l’union s’est révélée déterminante, entre résistants, entre troupes alliées. Mais parfois aussi d’ailleurs, une union inédite.
Ainsi, à Livourne, dimanche dernier, j’étais présente avec 6 d’entre vous pour rendre hommage - pour la première fois en 80 ans - aux soldats italiens, notamment ceux de la division Friuli, qui alors que l’Italie rentrait dans une guerre de libération et une guerre civile, ont rejoint nos résistants et les forces alliées périssant aux côtés des partisans corses dans les offensives contre les troupes nazies. De puissance occupante à force alliée dans la libération, c’est cette Italie à nouveau unie dans une relation libre à la Corse que nous avons souhaité célébrer.
De la même manière, nous étions nombreux, comme chaque année, à saluer à Tighjime et Saint-Florent le 3 octobre la mémoire des goumiers marocains, valeureux soldats qui ont participé à la libération de l'île avec courage et fraternité, loin de chez eux et dans des conditions terribles.
Sur la stèle érigée à leur mémoire sur le site de la bataille, on peut lire : « Remplis du souvenir d’une lumière unique, leurs yeux se sont fermés aux brumes d’occident. Seigneur, permettez que les durs guerriers de berbèrie qui ont libéré nos foyers et apporté à nos enfants le réconfort de leur sourire, se tiennent contre nous, épaule contre épaule, et qu’ils sachent, Ô qu’ils sachent Seigneur combien nous les avons aimés »
Epaule contre épaule, toujours aux côtés de nos frères marocains, italiens, méditerranéens et européens, unis pour honorer la mémoire de tous ces combattants qui, d’horizons si différents, ont péri pour défendre un idéal : celui de la paix.
 
L’union que nous appelons de nos vœux, s’est également manifestée de manière émouvante et heureuse le week-end dernier lors de la création du Cardinal Bustillo et lors de sa première messe romaine. Le choix de le maintenir dans ses fonctions d’évêque de la Corse est un signe fort de l'Eglise envoyé à notre île. C’est également la preuve, s’il en fallait une, que le Saint Siège a envoyé auprès des Corses un de ses plus fidèles serviteurs ce qui représente un grand privilège en soi. Qu'ils soient croyants ou non, les Corses peuvent se reconnaître en cet homme d'une grande qualité humaine et spirituelle, qui a su en peu de temps tisser des liens avec toutes les forces vives de notre île, se montrer à l’écoute de nos difficultés, des maux et des espoirs du peuple corse et qui s’est révélé indéniablement comme un fervent artisan de paix. Parmi les 800 Corses présents à Rome, nous n’étions pas tous d’accord, nous étions certainement tous différents mais nous avons su « communier » autour d’un événement majeur pour notre peuple.
Cari eletti,
La Corse est à un moment crucial de son histoire. Nous avons une opportunité d’inscrire dans la Constitution nos spécificités, notre langue, et de leur garantir une protection renforcée. Nous avons le pouvoir, ou plutôt le devoir de construire une nouvelle relation avec l’Etat, fondée sur le respect mutuel et le dialogue. Nous avons une responsabilité collective de réussir, pour nous-mêmes et pour les générations futures. Ensemble et unis nous avons à construire l’autonomie dont la Corse a besoin car c’est ensemble et seulement ensemble, que nous garantirons le succès de cette évolution institutionnelle et l’avènement d’une trajectoire de développement durable et de paix à laquelle nous aspirons tous.
 
A ringrazià vi !
 

* Seul le prononcé fait foi

Rédigé le Jeudi 5 Octobre 2023 modifié le Jeudi 5 Octobre 2023

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